La ballerine de l’Au-delà


Grand Jacques La ballerine de l’Au-delà Ajouté le 18/06/2012 à 22h22

La ballerine de l’Au-delà

Quelquefois par les chemins embrumés de mes nuits d’automne, elle passe, tel un ange habillé d’Aurore, pâle et dansante silhouette qui va se fondre dans l’obscurité.
A la lisière lointaine de cette étrange forêt qui surgit en mon délire comme un mirage, elle se profile Sylphide venue d’une antique légende, et elle glisse entre les arbres noirs, dans un tourbillon azuré.

Les murs de la nuit s’élèvent contre le ciel sombre un château fantasmagorique, vaguement éclairé par cent lueurs féeriques et changeantes, bleues, roses, violettes, d’or, de nacre de rubis de saphir et d’émeraude.
Sur la rive incertaine de l’inconnu, elle apparaît aussi, blonde Princesse des Mille et Une nuits, et l’escortent toutes les étoiles, et le clair de Lune tresse de reflets dans sa chevelure ondoyante.

Parfois elle revient de là-bas, elle revient de l’oubli, fugitif spectre de clarté qui traverse mes nuits de détresse
Et elle danse au seuil de l’Éternité, sur les vagues immatérielles de la musique de Saint Saëns, la lente agonie d’un cygne blanc
Elle sourit, mystérieuse et inaccessible, dans l’enchantement de la lune, et ses chaussons tissés de nuage, qui touchent à peine le sol, éparpillent tour autour d’elle d’impalpables pétales de neige parfumée.

Puis en silence, elle s’éloigne, fleur ailée, flamme éphémère, libellule gracieuse portée par la brise.
Avant que ne palissent les étoiles, avant que l’aube ne répande enfin sa poussière de roses à l’horizon lointain, elle s’en va, dans un froissement de tulle et de soie, par d’invisibles sentiers, tandis que sur un rayon irisé, s’éteint doucement la voix éthérée du violoncelle.

Elle est partie il y a si longtemps déjà…elle a fui, telle une fleur qu’emporte la bise de l’hiver.

Mais, de temps en temps elle franchit la frontière de l’autre monde, elle repasse au travers du miroir du Temps.
Et là, au pays brumeux de mon souvenir, elle danse pour revivre les rêves perdus d’autrefois, les illusions envolées au vent du destin, et les vaines espérances qu’elle a laissé ici-bas.

Car en cette sombre et lointaine nuit de décembre, la main glacée de la mort est venue coupée les douces roses de ces vingt ans. Mais, comme le papillon captif d’un sortilège de lumière, elle revient brûler ses ailes sur le feu immortel et sacré.
La mort n’a pu atteindre le songe de beauté et d’absolu qui étoilait son regard. La flamme magique de la danse, embrase toujours son âme.

Je le sais, car lorsqu’elle visite mes nuits de tristesse, je vois dans l’eau verte de ses prunelles, le reflet ensoleillé de son rêve de ballerine

Je le sais, car, j’ai partagé avec elle les même songes de mille étoiles.

Je le sais puisque c’était ma sœur


Eddy M RE: La ballerine de l’Au-delà Ajouté le 19/06/2012 à 13h54
La perte d'un être cher est toujours difficile... Magnifique et touchant ce poème !

motscoeur RE: La ballerine de l’Au-delà Ajouté le 29/06/2012 à 23h11
Bouleversant...

Mathilde & Willy RE: La ballerine de l’Au-delà Ajouté le 30/06/2012 à 23h45
Moi qui te connais si bien, je sais pourquoi tu portes si souvent au ciel tes yeux de rêve et de chansons. C’est pour voir ta petite ballerine faire les pointes sur la Grande Ours. Poignant hommage à cette sœur, cette enfant perdue dans sa vingtième année.
Ton amie de Bruxelles

Mathilde

Plume
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