Le monde de profil au bain ou Loin des rails


Sappho4 Le monde de profil au bain ou Loin des rails Ajouté le 05/12/2008 à 00h37
Le monde de profil au bain.

Celui qui s’est perdu dans une mine d’or ne retrouvera jamais son chemin quoique de loin en loin brille une pieuvre suspendue au plafond comme un lustre.
D’ici, de ce wagon qui file entre les gerbes de plumes vertes, je les vois toutes, ces grandes flammes, même celles qui déjà sont redevenues des lanternes que le vent agite pour en extraire des capsules d’opium. Une ombre suivie d’un homme a franchi une porte et nous aurions pleuré sans les nuages, sans l’espérance d’un million de lacs jetés sur la chaussée à une heure du matin, sans la ficelle pour retenir le printemps feuille à feuille, sans la manivelle
du torrent qui hante les grands magasins.
Maintenant nous n’habitons plus nos sandales, d’autres volent avec elles, autour d’une chute immense du lierre sur les toits. Nous les suivons des yeux jusqu’à ce qu’elles aillent se perdre avec le pollen parmi les arbres sculptés dans le vin blanc ou autour des marbres fiévreux des villas défendues par leurs épines. Alors nous les perdons effectivement de vue sans renoncer toutefois à croire qu’elles ne puissent pas ressurgir à la faveur d’un cyclone au fond du vieil encrier, et vous nous surprenez à rêver, le doigt sur la gâchette.
Car c’est nous qui provoquons les catastrophes d’où sortent la nostalgie et sa sœur la mélancolie, toutes ces fleurs dont la violette commande l’apparition sur nos tombes et sur nos lits passagers visités par des femmes au front transparent. Regardez à travers l’os quel cerveau elles ont aujourd’hui ; ne dirait-on pas l’œil d’un phare ou la toupie d’un sage ayant franchi tous les cercles ? Il vient, guidé par son ombre, suivi de ses rivières ; sa tête qu’il porte sur un plat d’or, il l’a trouvée dans un self-service, parmi d’autres plats préparés, prêts à être consommés sur le comptoir qu’autrefois décorait une bijoutière.
Cette flamme qui résistait et devait occuper dans la nuit le poste le plus convoité, je la revois, roulée dans un manteau – mais de qui parlez-vous ? – et toutes celles qui l’ont précédée me décrivaient sa venue entre leurs dents pointues comme leur cœur : sous la tente, dans le désert qui sert de sablier à ceux qui mesurent l’espace, sur le lit des nuages lorsqu’ils perdaient leurs plumes, à l’extrémité de la terre ou là où il est prouvé qu’elle n’est point ronde mais ivre d’un vin bu au fond d’une grotte un soir d’été, sur mer dans les temps où les vagues crachaient des pépins, à l’angle formé par le ciel et la terre, dans le coin cher aux écoliers en colère.
Nous n’avons pas changé de cap. Je m’adosse aux eaux vertes pour écrire quelque folie que vous froisserez avec votre sang, vivement, sous le regard des autres voyageurs cramponnés à la même poutre, pendant que le vent reconstruira le désordre.



Hubix-J.Felert RE: Le monde de profil au bain ou Loin des rails Ajouté le 05/12/2008 à 10h03
bonjour Sappho,ceci est surréalistiquement passionnant cette prose poétique où tu nous emmène par le bout des yeux sans que même notre esprit puisse l'éviter...bon à part ça,je préfère éviter les self-services...à bientôt.

fildefer RE: Le monde de profil au bain ou Loin des rails Ajouté le 18/01/2009 à 19h07
salut mon amour
ts mots sont bons
tu sais que je t'aime mais pas sous ce nom là
je t'embrasse sur les yeux

loreley89 RE: Le monde de profil au bain ou Loin des rails Ajouté le 19/01/2009 à 12h05
Comment vous dire ...vous êtes l'oeuvre, où chacun aime chercher son "moi" et se perdre dans les sous-entendus et les métaphores...bravo Sappho, quelle richesse de mots!!! Moi, je veux bien me perdre dans les méandres..de cette rivière
Mais, je peux dire un immense bravo à Fil de Fer, et Hubix, inépuisables sources où je viens me désaltérer de cette soif de mots....

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