Ultime Parloir


Astrid A. Ultime Parloir Ajouté le 12/11/2011 à 11h48
"Et c'est en traversant des chemins escarpés, des trajets de mon passé que je m'avance vers le parloir. L'ambiance est lourde et pesante, et c'est en tremblant que je pose mon dérisoire postérieur de vieil homme aigri par la vie sur cette assise horizontale et rigide qui me sert vraisemblablement de chaise.La pièce n'est pas très grande, je semble enveloppé dans une atmosphère blanche purificatrice. Face à moi, cette ouverture paradoxalement fermée comme seule et unique conversation ouverte vers l'extérieur. Je me vois, dans cette vitre, mon visage creusé par les années, érodé par le temps, traversé de rides comme autant de sillons sur une terre desséchée par la dureté de la vie. Je prends mon temps, je me contemple, il est bien loin le temps de l'insouciance, mais le calme est là, je suis las. Puis, j’aperçois à côté de mon reflet, ce vieil homme inconnu, souriant de ses belles dents comme si l'on se connaissait depuis des années, ou mêmes des centaines de vie. Il me sourit et me regarde. Ses yeux me transmette une sorte de chaleur étrangement singulière, ses prunelles m’apaisent. D'un geste magistral de sa dextre nue, la vitre du parloir disparut. Il me tends la main, j'éprouve à cette instant, une inquiétude caduque. Sa chaleur semble se transformait en lumière étincelante, je saisis son poignet. Je suis libre, je suis pensée. Je suis... mort."



[Astrid Arnaud - 12/11/2011]



« La clémence honore le pouvoir. » [Hazrat Ali]


Grand Jacques RE: Ultime Parloir Ajouté le 12/11/2011 à 15h05
Bonjour Astrid

La porte et la fenêtre sont les symboles d’un franchissement, d’un départ. Dans ton texte magnifique la métaphore du passage d’un être . L’homme passe sa vie en rendez-vous de toute sorte et celui-ci est l’ultime. Il fait le bilan de sa présence sur terre avant le passage d’un monde inconnu
La fenêtre constitue donc un motif de prédilection dans l’imaginaire des artistes : elle participe indéniablement de la construction d’un espace esthétique, poétique et symbolique ; elle ouvre la voie vers un jeu infini de possibles dialectiques

La pensée de la mort est une pensée qui nous obsède, parce que le temps psychologique nous travaille et nous inquiète. La mort est présente en arrière fond de nos angoisses sourdes et pourtant, même en y pensant souvent, nous y pensons sans savoir ce qu’elle représente. . La mort est elle une certitude indéfinie dans le temps, mais dont l’objet réel nous échappe ?

La Dame pâle…

Je la porte en moi depuis ma naissance
Je suis venu au monde avec
C’est la plus vieille de mes connaissances
Une Dame pâle qui me donne des ailes

Je lui donne le temps de me désirer
Elle fera ce qu’elle veux de toutes façons
Ça ne sert à rien de se verrouiller
Elle entrera dans ma maison

C’est ensemble qu’on partira
Elle connaît mieux que moi le voyage
Elle a le billet, elle me dira
Le jour, et l’heure et à quel âge

Je ne l’aurai pas vu depuis ma naissance
Et je quitterai le monde avec elle
Je ne suis pas pressé de faire la connaissnce
De la dame pâle qui me donne des ailes

G.J




Astrid A. RE: Ultime Parloir Ajouté le 12/11/2011 à 16h56
Magnifique texte sur ta dame pâle à toi. Un voyage sur le Styx me parait indéniablement nécessaire, peut m'importe, jour, mois ou années, je n'oublierais pas mes deux pièces d'or et mon passage ne sera pas forcé. On ne s'invite pas au passage de barque, on y est convié.

La mort est attirante par son mystère, tout ce qui nous intrigue attire. A partir du moment où le voile est levé, la chose perd tout son attrait instantanément.
"La mort, c'est le meilleurs moment de la vie, c'est pour ça qu'il est préférable de le garder pour la fin" Gustave Parking (si je me rappelle bien). J'ai bien souvent tendance à confondre les auteurs, les comiques, les groupes etc... mais du moment que le texte y est, c'est l'essentiel.

Au plaisir de partager.

A.A.

Grand Jacques RE: Ultime Parloir Ajouté le 12/11/2011 à 18h17
Merci pour ma Dame Blanche..

Faire son dernier voyage sur une barque conduite par Caron le nocher des Enfers n’est-ce pas partir en poésie ?

"L'homme n'a qu'un mal réel : la crainte de la mort. Délivrez-le de cette crainte et vous le rendrez libre".
((Chateaubriand))

Ô mort, vieux capitaine, il est temps, levons l’ancre
((Baudelaire))

G.J

Plume
© Indigene Poésie 2003-2019. Tous Droits Réservés.